Présentation
Né en 1855 à Paris, faubourg Saint-Martin, au sein d’une famille aisée de négociants du Xème arrondissement, Alphonse Georges Fournier fait ses études au lycée Stanislas, puis à l’École centrale des Arts et Manufacture de 1877 à 1879. Il débute une carrière d’ingénieur, et officie commeinspecteur des chemins de fer à Pau de 1880 à 1885. Attiré par les arts, et sans doute encouragé en ce sens par son frère architecte Ernest, il prend en 1886 la direction artistique de la Faïencerie Pierre-Claude Poussin à Bourg-la-Reine, et en devient propriétaire en 1888. Malgré sa participation à l’exposition universelle de 1889, où Georges Fournierprésente des vases, services de table et des carreaux de revêtement, l’établissement fait faillite cette même année. L’artiste prend alors la décision radicale de se tourner plusrésolument vers la peinture et installe son propre atelier au 90 rue d’Assas à Paris, dans le VIème arrondissement. Après une formation à l’académie Julian puis auprès du peintre Auguste Joseph Delécluse, Fournier expose presque chaque année au Salon des Indépendants à partir de 1895, ainsi qu’au Salon des Artistes Français dès 1903. Il se spécialise rapidement dans les vues de Paris et de la proche banlieue, en adoptant au pastel ou à l’huile la touche fragmentée et les couleurs claires desimpressionnistes. A partir de 1896, il participe aux expositionsd’avant-garde des Peintres Impressionnistes et Symbolistesorganisées par la galerie Le Barc de Boutteville, rue Le Peletier à Paris. C’est cette même galerie qui accueille dès 1897 sa première exposition personnelle, réunissant pas moins de soixante-quatorze peintures, pastels et aquarelles représentant exclusivement des vues de Paris et de ses alentours (fig. 1). Oscillant entre la capitale et Versailles, où il établit également un atelier, Fournier effectue régulièrement des séjours d’étude en Bretagne. En 1913, il se fait construire d’après ses propres plans sa maison de villégiature « Kerlann» à Concarneau, munie d’un nouveau grand atelier au deuxième étage avec une verrière exposée plein est pour bénéficier de la lumière blanche du matin. Devenu le voisin direct des peintres Fernand Legout-Gérard et Alfred Guillou, ainsi que du couple Leuze-Hirschfeld, l’artiste se tourne progressivement vers une iconographie plus rurale et bretonne, qui connaît un certain succès.  
Nos deux œuvres se rattachent directement aux premières années de production de Georges Fournier, qui voient l’artiste fréquenter les cercles d’avant-gardes du Barc de Boutteville. La première (cat. 1) est une huile sur toile datée de 1895 et figurant un grand boulevard parisien, sans doute le Boulevard Saint Michel, saisi par une froide et humide journée d’hiver dans son agitation toute bouillonnante. Entre les arbres dénudés se dressent les colonne Morris de forme cylindriqueet les kiosques couverts d’affiches publicitaires, prenant place sur une ligne en léger retrait de la bordure du trottoir. Disposés de manière régulière, ces petits cabanons destinés à la vente des journaux, de fleurs ou de rafraîchissements constituent une ligne de fuite qui dirige le regard du promeneur vers la place ou le monument ponctuant la voie. La touche moderne, apparente et lâchée entend traduire l’atmosphère de la rue parisienne, les reflets des flaques d’eau sur la large contre-allée mouillée, ainsi que le fourmillement des citadins immergés dans la foule ou chargeant l’omnibus noir visible à gauche. 
La deuxième œuvre (cat. 2) que nous présentons est un rare pastel d’obédience impressionniste par la luminosité éphémère des dernières heures du jour qu’il parvient à capter. L’urbanisme plus dépouillé et inscrit sur une sensible côte suggère vraisemblablement une rue montmartroise. Georges Fournier parvient habilement à retranscrire les reflets jaunes de la lumière sur l’eau coulant le long du caniveau. Sous les réverbères encore éteints se pressent trois jeunes enfants, encore chargés de leurs cartables d’écoliers. Autant d’éléments qui témoignent d’un travail effectué directement sur le motif, et d’une parfaite maitrise technique qui justifie les éloges formulés par le célèbre critique Léon Roger-Milès, dans sa préface au catalogue de l’exposition personnelle de l’artiste en 1897 : « Coloriste, M. Fournier l’est avec une réelle puissance et une audacieuse franchise, dans ces coins de province, dans ses coins de Paris surtout, qu’il aime surprendre à l’heure crépusculaire, par les temps où il a plu ; il affirme sa volonté d’avoir l’euchromatisme violent sans vaine brutalité, et sonore sans cesser d’être harmonieux. Il est telles de ses vues, qui sont bien près d’être parfaites, avec leur arrangements heureux, leur couleur où passent des éclats, le grouillement des êtres et des bêtes qui s’y meuvent, et sont bien la vision de la vie. »
Œuvres
Expositions