Présentation
Né en 1858 à Nowosiółki Gościnne, alors possession del’empire austro-hongrois, Piotr Stachiewicz compte parmi lesplus grands artistes polonais de sa génération. Entre 1877 à 1883, il étudie à lAcadémie des beaux-arts de Cracovie auprès des peintres Władysław Łuszczkiewicz et Florian Cynk, avant de parfaire sa formation, de 1883 à 1885, à lAcadémie des beaux-arts de Munich, dans l’atelier d’Otto Seitz. En 1886, fraichement diplômé, il entreprend un long voyage, parcourant successivement lItalie, la Grèce et le Proche-Orient, jusqu’à Jérusalem. A son retour, il installe son atelier à Cracovie, où il entame une brillante carrière de portraitiste et de peintre d’histoire, concevant notamment les mosaïques pour la Basilique du Sacré Cœur de la ville. Peinte de 1893 à 1895, son importante série de peintures représentant les ouvriers des mines de sel de Wieliczka lui vaut le prix de lAcadémie polonaise des arts et sciences. Membre de la Société des amis des Beaux-arts de Cracovie depuis 1889, il en devient le vice-président de 1900 à 1913. Bien que participant aux expositions internationales sous le drapeau autrichien, Stachiewicz se fait le fervent partisan d’un nationalisme polonais décomplexé, notamment lors de l’exposition Universelle de 1900 à Paris, où il présente un ambitieux ensemble de toiles religieuses figurant les légendes de la Mère de Dieu (cat. n° 138), en partie inspiré par la Vierge noire de Częstochowa. C’est également dans ce sens qu’il travaille à l’illustration des ouvrages de grandes figures littéraires polonaises de son temps, tels Adam Mickiewicz, Maria Konopnicka et Józef Ignacy Kraszewsk. Son œuvre la plus remarquable dans ce domaine reste une série de vingt-deux peintures réalisées en 1910 pour Quo Vadis dHenryk Sienkiewicz. Devenu une figure nationale lorsque la Pologne recouvre son indépendance en novembre 1918, il reçoit en 1923 la Croix dOfficier de lOrdre Polonia Restituta, plus haute distinction de son pays.
Datée de 1917, notre aquarelle semble illustrer par son sujet macabre et symboliste les préoccupations qui hantent l’esprit de Piotr Stachiewicz, alors que l’Europe entière est encore enlisée dans un conflit qui ne trouve plus d’issue. Dominant le vol bas des corbeaux noirs, dans le paysage semi-ténébreuxd’une soirée d’automne, un squelette, allégorie de la mort,joue de son violon, seulement enveloppé d’une gaze transparente. Comme les feuilles mortes qui l’entourent, il est soulevé par une bourrasque, flottant comme un spectre entre d’étranges troncs de bouleaux tachetés blancs et noirs. Directement inspirée des Danses macabres de la fin du Moyen Âge, cette iconographie singulière renvoie inévitablement au contexte du conflit particulièrement meurtrier qui embrase l’Europe. Son titre polonais « Taniec Jesieni » apposé sur le montage, que l’on peut traduire littéralement par « Danse d’automne », évoque sans doute plus spécifiquement les évènements contemporains de la révolution russe d’octobre, bouleversant l’échiquier politique du front est, et apparaissantdéjà, à juste titre, comme une sérieuse menace à une possiblerenaissance de la nation polonaise.
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