Présentation
Fils d’un riche notaire de Corbeil, élevé dans un milieu privilégié et cultivé, Maurice Biais est un artiste de la Belle époque aux multiples talents, tour à tour graphiste, affichiste, illustrateur et designer de meubles, de verres et de céramiques. D’abord inspiré par Jules Chéret et l’esthétique art nouveau, il sut rapidement s’en démarquer pour créer son style propre.Enfant terrible de Montmartre, il forme avec sa compagneJane Avril, l’une des plus célèbres danseuses du Moulin Rouge avec qui il a eu un fils en 1897 et qu’il finit par épouser en 1911, l’un des couples les plus actifs de la vie nocturne de la butte. Joueur endetté, incurable buveur et fumeur invétéré, en rupture de ban avec sa famille, il parvient néanmoins à mettre ses qualités de décorateur au service des plus grandes boutiques parisiennes. Employé un temps à la maison de l’Art nouveau inaugurée par Siegfried Bing en 1895, pour laquelle il réalise d’importantes peintures murales, Maurice Biais rejoint ensuite dès 1899 son principal concurrent, la non moins célèbre Maison Moderne de Julius Meier-Graefe. Ce dernier, après avoir fréquenté la communauté artistique d’avant-garde de Berlin, où il avait contribué à la création de l’influentmagazine Pan, avait ouvert en 1898 son propre magasin à Paris dédié aux arts décoratifs, proposant aux clients d’aménager leurs intérieurs en réunissant des sculptures,poteries, verres, lampes et bijoux. Outre Van de Velde, qui expose ses créations, Meier-Graefe fait appel à certains jeunes affichistes comme Manuel Orazi pour faire sa publicité. En 1902, Maurice Biais réalise pour la boutique une affiche sur laquelle on peut voir une élégante cliente, dont la présentation de dos invite le spectateur à regarder avec elle un encrier et une lampe dessinés par Maurice Dufrène, des petites sculptures en bronze de George Minne, un chat en porcelaine de la manufacture danoise Bing & Grøndahl, ou encore, au second plan, un fauteuil d’Abel Landry (fig. 1). Si Biais s’adonne également à l’illustration, contribuant à des périodiques comme Le Journal pour tous, des ouvrages pour la jeunesse, l’édition de partitions musicales ou de cartes postales, ce sont avant tout ses affiches qui assoient sa notoriété, aussi bien en France qu’à l’étranger. En 1901, il expose ainsi chez Williams à New York, avant de présenter seslithographies au Salon des Artistes Français de 1903 (cat. n° 3794 et 3795). Engagé sur le front en 1914, il est décoré de la croix de guerre mais revient profondément marqué et blessé par les gaz de combat. Parti se soigner dans le sud de la France au début de l’année 1926, il décède le 8 avril au sanatorium de Gorbio, bordé par Jane Avril.
De format vertical, l’écran de cheminée que nous présentons appartient à la période la plus féconde et moderne de Maurice Biais. L’artiste a superposé en les cousant deux compositions brodées et peintes sur toile aux sujets assez similaires. Figurant de jeunes élégantes dans des jardins, alternant les seuls noirs et blancs, leurs traitements synthétiques évoquent déjà les premières réalisations de Bernard Boutet de Monvel. La typologie des signatures apposées dans les deux cas en bas à droite, écrites en toutes lettres et encerclées, rattache l’objet à l’année 1902, et suppose ainsi qu’il ait pu compter parmi les pièces exposées dans la Maison Moderne de Meier-Graefe
Œuvres